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L@ Force Européenne pour le Transfert de Technologies Médicales et Humanitaires
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samedi 22 mars 2014
lundi 10 mars 2014
Éloge funèbre du Professeur SO Satta
Jacques BAULIEUX - 5
mars 2014
M. le Professeur SO
SATTA nous a quitté le 27 février 2014, dans sa 82e année.
Il quitta le Cambodge en 1972, envoyé par le gouvernement cambodgien comme Ambassadeur représentant permanent du Cambodge auprès de l'Office des Nations Unies à Genève et il le demeura jusqu'en 1975.
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Le Professeur SO
SATTA est né à KAKDOL au Cambodge en 1931. Son père était gouverneur de
province. La famille comportait sept enfants, tous marqués par la culture
française. Lui-même, après de brillantes études, passa son baccalauréat de Sciences
expérimentales, en français, au lycée Descartes de Phnom-Penh.
En 1953 il vint en France
et intégra l’Ecole de santé militaire, 55e promotion. Il devint d'ailleurs
médecin-capitaine de l'armée de l'air française. Il obtint son diplôme de
doctorat en médecine en 1962.
En 1963 il épousa à
Lyon, Mlle Marie-Thérèse Faivre, d'origine bourbonnaise. Elle lui donna deux
enfants Thirong-Patrick et Linda-Sylvie, qui a elle-même deux filles Laura et
Caroline.
Le médecin capitaine
SO SATTA affecté dans l'armée de l'air, fut autorisé à finir son Assistanat-Chefferie
de travaux à la Faculté de médecine de Grenoble, où il apporta son concours à
l'enseignement de la physiologie.
En 1965, il fut nommé
Professeur agrégé en médecine : section physiologie exploration fonctionnelle.
Il quitta alors Grenoble et retourna dans son
pays pour enseigner à la Faculté de médecine de Phnom-Penh, où il a assuré
également la fonction de Secrétaire général, de 1963 à 1971. L'enseignement s’y
faisait alors en français. La Faculté de médecine de Phnom-Penh était un joyau
de la médecine française en Extrême-Orient. Elle le restera jusqu'à
l'apocalypse Khmer Rouge.
Dans son pays, les
valeurs universitaires du Professeur SO Satta, son goût pour la chose publique,
son sens de l'organisation, ont été vite reconnus et appréciés.
Il fut nommé en 1971,
Ministre de la santé publique, pendant la difficile période de la guerre du
Vietnam, et le restera jusqu'en 1973. Il participa alors très activement aux
soins aux blessés, à l'organisation des hôpitaux de campagne.
Il quitta le Cambodge en 1972, envoyé par le gouvernement cambodgien comme Ambassadeur représentant permanent du Cambodge auprès de l'Office des Nations Unies à Genève et il le demeura jusqu'en 1975.
Le 17 avril 1975 avec
l'entrée des Khmers rouges dans Phnom-Penh, le Cambodge a basculé dans le
néant. Une utopie meurtrière fit environ 2 millions de morts et a laminé et
anéanti la culture cambodgienne.
La mère de M. SO
Satta a été déportée dans la région de Pursat. Il ne l'a jamais revue, ainsi
que de nombreux membres de sa famille.
Affrontant ces
circonstances difficiles, le Professeur SO Satta choisit en 1975, de demander
l'asile politique à la France, ce pays qui lui avait donné son éducation, qu'il rejoignit comme « réfugié politique ».
Il s'installa à Lyon
comme médecin généraliste libéral, quai Pierre Scize, en association avec le
docteur Pierre Ludin.
Il obtint en 1976 un
contrat de Professeur-attaché à temps partiel, dans le Laboratoire
d'exploration fonctionnelle respiratoire de Pédiatrie, de la Clinique médicale
infantile du Professeur Robert Gilly, au Centre hospitalier Lyon Sud
Mais la réintégration
fut difficile, comme pour la plupart des réfugiés, et son agrégation ne fut
reconnue que plus tard, grâce à Mme Simone Veil.
De 1975 jusqu'à la date
de sa retraite en 1996, le Professeur SO Satta a fait de la Salle de mesures
mécaniques pulmonaires du Service de pédiatrie au Centre hospitalier Lyon Sud,
un Laboratoire d'exploration fonctionnelle respiratoire du nourrisson et de
l'enfant, Centre de référence reconnu en
Europe.
Les travaux de
recherche portèrent non seulement sur la mucoviscidose, mais encore et surtout
sur les pathologies bronchiolaires des jeunes enfants.
En 1977, lui fut
reconnue la nationalité française.
C'est à partir de ce
moment que commença véritablement l'Action humanitaire, culturelle et sociale
de M.SO Satta :
-Les réfugiés
cambodgiens arrivaient « à flot » en France, spécialement dans la
région Rhône-Alpes, où ils furent logés dans des centres d'accueil. Ils ne
connaissaient ni les habitudes de vie,
ni les mœurs, ni les coutumes locales. Il fallait aider leur installation et
les intégrer. M. SO Satta participa activement à la formation des travailleurs
sociaux, par des séminaires, des rencontres et des actions de terrain.
Aujourd'hui 2500 familles vivent dans notre région et pour la plupart se sont
parfaitement intégrées. Le mélange est parfait, voir exemplaire. La délinquance
est quasi nulle. Beaucoup d'enfants ont fait des études de niveau élevé et
occupent des postes de haut niveau dans la région. Il y a peu de chômage chez
les cambodgiens. Tout cela, on le doit certes à la France, mais aussi et beaucoup
à l'aide apportée par le Professeur SO Satta.
- En 1988 il fonda
l'Association bouddhiste Bouddhi Sahapan. Avec l'aide de son épouse, a pu
être installé un lieu de culte
bouddhiste dans un petit appartement de la Duchère. Puis a été faite l’acquisition
d'un lieu de culte à Saint Genis-Laval, afin d'assurer la présence permanente
des moines bouddhistes. Il y a
actuellement deux bonzes et ce lieu de culte fonctionne parfaitement bien.
C'était une de ses grandes fiertés.
-Après une importante
intervention chirurgicale cardiaque, en 1998, il fonda une première Association
de développement médical et aide humanitaire au Cambodge (ADHMAC).
En partenariat avec
l’Université des Sciences de la Santé de Phnom Penh, a été mis en place le
Domaine Jayavarman VII, Pedagogic@, une technique d’enseignement assisté par
ordinateur ou e-learning.
-Puis quelques années
plus tard, pour des raisons d’ordre interne, a été crée une structure
associative
« La Force Européenne pour le Transfert des Technologies
Médicales
et Humanitaires » (L@FETT-MH),
pour venir en aide aux Hôpitaux et à
la Faculté de médecine de Phnom-Penh. En effet, dès l'an 2000, l'arrivée de
médecins stagiaires cambodgiens dans les différents hôpitaux de la région
Rhône-Alpes, nécessita la création d'une structure associative d'accueil des
étudiants et d’entraide à la Médecine cambodgienne. Cette association réunit un
grand nombre d'entre vous, résidants cambodgiens dans la région et des volontaires
français, motivés par le désir d'aider le Cambodge. Les actions de cette Association
sont multiples. Elle envoie régulièrement au Cambodge des containers de
matériel médical, pédagogique et informatique. Le denier container envoyé à
l’automne était le quatorzième…
Elle a participé à :
1. La rénovation matérielle du service de
réanimation de l'Hôpital Preah Sihanouk
2. La création d'un Service de
Pneumologie à l'Hôpital Preah Kossamak. L@FETT-MH a fourni des lits et des matériels
d'hospitalisation, envoyé des matériels d'exploration fonctionnelle
respiratoire, un laboratoire complet et elle a aidé à la formation des
pneumologues cambodgiens à Lyon, qui exercent maintenant dans cet Hôpital.
3. L'équipement d'une consultation de
gynécologie-obstétrique de l'Hôpital de Kompong Cham.
4. L'achèvement de l'équipement du centre
d'hémodialyse de l'Hôpital Calmette avec un envoi de 25 reins artificiels, en collaboration
avec le Dr MY Horn et le Pr.HENG Tay Kry.
5.
L'équipement d'une salle d'opération complète à l'Hôpital de Kompong
Trabek, en collaboration avec le Très Vénérable YOS Hut Khemacaro.
6. Puis, plus récemment, l'envoi de divers
matériels , en particulier l’envoi et le montage d'une cabine de compression MODUL’AIR à l'hôpital provincial de
Battambang, avec l'aide des Clubs Rotary de Mâcon et Chambéry. Plusieurs
missions de médecins, d'infirmières, de techniciens, et de membres de
l'Association « Electricien sans frontières » ont été organisées à
Battambang, pour moderniser et équiper cet hôpital. La quatrième mission doit
partir en mars prochain.
Je remercie tous ceux
qui, associations, clubs et particuliers, par leurs cotisations et leur dons,
ont participé au bon fonctionnement de l’Association.
L@FETT-MH est
certainement le plus bel héritage que
nous a laissé le Professeur SO Satta. Très récemment, le docteur Stéphane Workineh
en a été nommé le nouveau Président. Nous avons pris l'engagement de l’aider à poursuivre
son œuvre, dans l'esprit qui a été le sien.
La vie de M.SO Satta
n'a pas été un long fleuve tranquille. Son destin a été plutôt comparable à un
torrent impétueux.
J'ai eu la chance
exceptionnelle de collaborer et de travailler avec lui : c'était un modèle de
rigueur, de volonté, d'humanisme, de générosité et de droiture. Il était
parfois un peu rigide et n’aimait pas les écarts et le laisser-aller. Il m’a beaucoup aidé. Il m’a appris le
Cambodge, ses coutumes et ses traditions. Avec une voie douce et sans excès, il
savait faire comprendre et aimer son pays. J’écoutais toujours ses conseils,
que je sollicitais souvent. Je lui dois beaucoup.
Je le rencontrais fréquemment depuis quelques
années chez lui, en fin d’après-midi. J’ai été très sensible à l’accueil de son
épouse Marie-Thérèse, qui connait parfaitement l’Association et la Communauté
cambodgienne. Vive et souriante, toujours accueillante, elle nous faisait
volontiers des suggestions judicieuses et très utiles. Nous aurons
certainement besoin de ses conseils,
dans l’avenir.
L’engagement de Mr.
SO Satta pour la formation de la jeunesse cambodgienne et les liens étroits
qu'il a su maintenir entre les communautés médicales cambodgiennes et françaises,
en pleine collaboration avec les responsables de l’Université des Sciences de
la Santé de Phnom Penh, ont soulevé l'admiration de tous.
Par sa distinction et
peut-être aussi, ses beaux cheveux blancs, il attirait le respect. D’ailleurs,
j’ai pu constater que tous ses anciens élèves du Cambodge, avaient pour lui une grande reconnaissance et un
profond respect. Les témoignages qui parviennent de toute part actuellement, le
confirment totalement. Se recommander de
lui, au Cambodge, ouvre toutes les portes.
Sa présence constante
pour aider à l'intégration de la communauté cambodgienne, a marqué les esprits
et sa disparition laisse un grand vide.
Ce sont toutes ces qualités qui lui ont valu
la reconnaissance et les nombreuses distinctions qui lui ont été accordées au
cours de sa vie :
- Commandeur de
l'Ordre du Monisaraphan du Cambodge,
- Chevalier de
l'Ordre Royal du Cambodge,
- puis, plus
récemment, Chevalier de la Légion d'Honneur française, en 2007, distinction
dont il était très fier.
J'ai pu l'accompagner,
avec quelques amis proches, tout au long
des derniers mois de sa vie, et même de ses derniers jours, alors qu’il n’avait
plus qu’un faible souffle de vie. Il était parfaitement entouré par les siens.
Il était tout à fait conscient de l'issue finale de la grave maladie dont il
était atteint. Il a affronté le mal avec une force et une dignité exemplaire.
Pour tout ce qu'il
nous a apporté et qu'il laisse derrière lui, comme héritage, nous lui devons
tous une reconnaissance infinie.
Jacques BAULIEUX
Consul Honoraire du Royaume
du Cambodge
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